La dernière étude du CNC sur la diffusion des films à la télévision permet de mettre en évidence les lacunes des catalogues proposés en vidéo à la demande par abonnement.
Le CNC a publié la semaine dernière son étude annuelle sur « La diffusion des films à la télévision » pour l’année 2014. Outre son importance pour analyser en détail l’offre de films de cinéma sur les chaînes nationales gratuites, l’étude suscite également des pistes de réflexion quant à la place de la vidéo à la demande par abonnement. De fait, malgré des contraintes majeures liées à la chronologie des médias (interdiction de proposer des films récents de moins de trois ans), le cinéma représente une composante essentielle de l’offre de VàDA avec plus de 1000 films présents tous les mois sur les deux principaux services, CanalPlay et Netflix. Si les séries TV ou l’offre jeunesse sont mises en avant pour recruter des abonnés, le cinéma reste une catégorie clé pour la fidélisation.
Or, l’étude du CNC montre que la structure de l’offre de cinéma à la télévision gratuite pose de réels problèmes de positionnement pour la vidéo à la demande par abonnement qui souhaite apparaître comme une proposition complémentaire. Trois éléments retiennent l’attention :
Pour aller plus loin sur ce dernier point et tenter de comprendre jusqu’à quel point les deux modèles de la TV gratuite et de la VàDA sont en concurrence sur le segment des films de catalogue ou films de patrimoine, nous avons analysé la présence en VàDA sur l’année 2015[2] des 100 films les plus diffusés sur les chaînes nationales gratuites entre 2005 et 2014. Ces films auxquels sont exposés de manière récurrente les foyers français (de 17 diffusions en 10 ans pour « Les bidasses en folie » en tête du classement à 10 diffusions pour « Scout toujours » en 100ème position) incarnent le cinéma à la télévision. .
L’emprunte nationale est très forte puisque le classement est dominé par le cinéma français qui représente 57% des œuvres contre 33% pour le cinéma américain, 8% pour le cinéma européen non français et 2% pour les autres nationalités.
La surprise vient du faible recoupement entre le Top 100 des diffusions TV et les catalogues VàDA. Moins du quart des films les plus diffusés sur les chaînes gratuites ces dix dernières années sont également disponibles en vidéo à la demande par abonnement : 22 films sur 100 sont ou ont été présents cette année en VàDA.
Autre enseignement, l’importance de CanalPlay qui concentre à lui seul 17 films sur 22 (65%). Netflix ne propose lui que 7 films dont 2 communs avec CanalPlay et 5 exclusifs. FilmoTV clôt le classement avec deux films seulement, également présents sur CanalPlay.
Cette prépondérance du service édité par Groupe Canal+ s’explique par une structure différente de son catalogue cinéma par rapport à Netflix. Sur les 17 films présents sur CanalPlay, 13 sont français et 4 seulement américains. A l’inverse, les 7 films présents sur Netflix sont tous américains. La situation reflète la réalité plus globale des deux catalogues puisque, si l’on s’en tient aux films sortis en salles[3], en excluant donc les sorties directes en vidéo, CanalPlay propose 52% de films français au mois de septembre (373 films sur 732) contre 34% de films français sur Netflix à la même date (248 films sur 766). C’est donc bien l’emprunte beaucoup plus locale de CanalPlay qui lui permet de proposer un plus grand nombre de films qui sont également très présents en TV gratuite.
Enfin, d’un point de vue plus qualitatif, s’il est très difficile de tirer des conclusions globales, l’exercice permet néanmoins de pointer une nouvelle fois les manques importants dans les catalogues des services par abonnement. Les Bidasses, les super flics Bud Spencer et Terence Hill, Astérix ou encore les Charlots sont tous absents. L’enregistrement reste encore le meilleur moyen pour le public qui ne supporterait pas d’attendre les rediffusions de se constituer une vidéothèque idéale. A moins que d’autres modèles comme l’achat définitif ne réussissent à s’imposer sur un segment de marché sur lequel la VàDA a pour l’instant échoué. De fait, en repartant de la liste des 100 films les plus diffusés ces 10 dernières années, le taux de transformation en VàD transactionnelle (achat définitif) passe à 55%[4], plus du double que pour la vidéo à la demande par abonnement.
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[1] Ceci étant, si en valeur absolu le chiffre est le plus élevé depuis 10 ans, la proportion de films inédits baisse légèrement (22,9% en 2013).
[2] Périmètre de l’analyse : CanalPlay, Netflix, FilmoTV, Club vidéo SFR et TFou Max sur 9 mois entre janvier 2015 et septembre 2015 inclus.
[3] Seuls deux DTV ont été identifiés dans le top 100 des films les plus diffusés sur les chaînes gratuites : le film russe « Wolfhound, l’ultime guerrier » et le film allemand « King Rising : au nom du roi ».
[4] 55 films sur 100 sont proposés à l’achat sur la plate-forme iTunes, dont le catalogue est le plus riche pour l’EST dans l’univers de la vidéo à la demande transactionnelle (relevé effectué le 20 octobre 2015)